Après de longues heures dans le Pot-au-noir, Sodebo Ultim 3 a repris de la vitesse la nuit dernière, porté par un alizé de sud-est qui forcit peu à peu. Avant de passer l’équateur ce matin, Thomas Coville a fait part de son plaisir d’être en mer.
Entré dans le Pot-au-noir dans la nuit de mardi à mercredi, Sodebo Ultim 3 en est ressorti un peu plus de 24 heures plus tard, au terme d’une journée pendant laquelle ses deux skippers « ont pas mal travaillé sur le foil (tribord, celui qui a été endommagé avant Madère) pour améliorer ce qui pouvait l’être », pour reprendre les mots de la nuit de Thomas Coville.
Qui a également raconté cette journée dans la zone de convergence intertropicale, l’autre nom du Pot-au-noir : « On a beaucoup subi, ça a été une journée compliquée, le Pot-au-noir est un piège naturel, comme les serres d’un aigle qui t’emprisonnent et dont tu as l’impression de ne jamais pouvoir te libérer. C’est en même temps un endroit absolument extraordinaire, complètement unique. Habituellement, on est impressionné par la mer, les vagues, parfois le vent, dans le Pot-au-noir, on est impressionné par la taille des nuages qui se forment sous vos yeux par la puissance de la chaleur et l’évaporation de l’eau. Ces nuages se déplacent et donnent cette sensation, une fois de plus, que quand on est en mer, on n’est pas grand-chose. C’est terrible parce qu’on voudrait maîtriser, avancer, gagner, mais en même temps, on se tait, on accepte ; devant un énorme nuage, on sent parfois qu’on est juste toléré. C’est un endroit entre la merveille et la démence de la nature, le moindre nuage a tellement de puissance… Toute la nuit dernière a été jalonnée d’éclairs, on ne fait pas les malins. »
Après avoir subi ces conditions erratiques, dans lesquelles il s’agit de tenter d’exploiter le moindre souffle d’air, d’où 24 heures à petite vitesse, Sodebo Ultim 3 a peu à peu retrouvé du souffle dans la nuit : « On avait l’impression d’avoir été abandonné par le vent, là, il est revenu. Le trimaran Sodebo Ultim 3 revit, bouge, il a de nouveau des mouvements qu’on aime. Ce n’est pas encore les grandes vitesses, mais on a l’impression que le cœur du bateau se remet à battre, c’est émouvant. »
Et le skipper de profiter pleinement de ce moment : « J’ai pris la barre, j’avais envie me faire plaisir, d’oublier la frustration d’être loin au classement, de sentir mon bateau revivre. Je suis juste à l’entrée du cockpit, la lune se reflète sur l’eau, avec le clapot, ça donne des millions et des milliards de diamants à la surface de l’eau, alors que c’était complètement lisse hier soir. La lune est tellement puissante que l’ensemble du ciel est illuminé. Il fait bon, pas trop chaud, j’ai enlevé mon tee-shirt, je peux sentir le vent sur ma peau et dans mes cheveux propres car on a pris une douche dans un grain, je profite de tout ça. Je regarde la vitesse, on est à 18 nœuds, à 74 degrés du vent, on fait du 190 et on arrive petit à petit vers l’équateur. Par rapport à il y a deux jours, c’est incroyablement jouissif. D’un seul coup, tout repart, c’est sacrément beau. »
Thomas Coville apprécie enfin les moments partagés avec son co-skipper : « On a passé une belle journée avec Thomas, on a bien bossé, on a réussi à rester concentrés, à régler le bateau, à travailler dessus. Notre cohésion me fait plaisir. On arrive à garder de l’humour, cette rencontre qu’on avait choisie, on est en train de la vivre, de se l’offrir. »