Sodebo Ultim 3 a passé la première marque de parcours de Brest Atlantiques à Rio de Janeiro mercredi soir à 23h23. Après 18 heures de navigation en tête sur une route Sud Ouest dans des vents forts et une mer formée face aux étraves, Thomas Coville et Jean-Luc Nélias ont pris la décision de temporiser et de réétudier leurs options sur la route vers CapeTown.
Le billet d’humeur des dernières 36 heures serait compliqué à écrire tant nos marins sont passés par différents états. Mercredi soir, aux abords de Rio éclairé et au passage de la première marque de parcours, c’était la joie. Revoir la côte et ses lumières, le Corcovado dans la brume, passer en tête de Brest Atlantiques… L’équipage de Sodebo Ultim 3 savait que la suite serait dure, mais ce court moment les a remotivé pour la suite.
La suite, c’est la nuit, et une dépression qui grossit sur la route vers CapeTown, tant et tant que la mer devient impraticable. En multicoque, on ne fait pas le dos rond : quand la houle vient de face, à bord, on ne peut que subir. Le chemin vers le Sud qui avait les faveurs des marins comme de la cellule routage semble se refermer, malheureusement, avant que Sodebo Ultim 3 ait pu s’y engagé et avec le risque de se faire rattraper par la dépression.
Jean-Luc Nélias (hier matin) : « Thomas, je ne sais pas comment te dire ça, mais on ne va pas aussi vite que prévu, la dépression nous rattrape et on va se retrouver coincés au près dans 45-50 nœuds entre la dépression qui nous rattrape et la zone de glaces, on va devoir tirer des bords dans une mer démontée. »
Il faut changer de trajectoire, reposer les options pour choisir le meilleur compromis performance / sécurité. Pour Thomas Coville, c’est une décision inédite et courageuse, une décision de raison pour ne pas mettre en jeu la sécurité des hommes et du bateau.
Thomas Coville : « Quand on a pris cette décision, j’étais vraiment désabusé parce que si on réussissait à passer sous cette dépression, on doublait la mise et on se retrouvait avec une très confortable avance, on changeait de système avant les autres. Prendre cette décision de rebrousser chemin pour être en sécurité a été très difficile à prendre. Moi, j’avais envie d’y aller, mais la raison a fait que c’était dangereux. C’est difficile à accepter de perdre autant d’avance.
En fin de journée, toujours en phase avec leur décision, si difficile qu’elle soit, Sodebo Ultim 3 continue d’observer la météo et les choix de ses concurrents qui ont désormais tous passés la marque de parcours à Rio. Et dans la soirée, les lignes bougent : le Trimaran Macif et le Maxi Edmond de Rothschild, deux bateaux éprouvés skippés par des marins aguerris décident de s’élancer vers l’Est en prenant une route très Nord. Le dernier né des Ultims, notre Sodebo Ultim 3 dont c’est la première grande course va lui aussi reprendre la route d’abord vers le Nord, puis vers l’Est . Au pointage de 12h ce matin, notre équipage est 3ème, 90 milles derrière le leader de la course.
24 heures après la décision de temporiser, l’équipage et la cellule routage de Sodebo Ultim 3 ont plus de recul pour analyser la situation. Au vu des conditions, la décision de changer de trajectoire était la bonne, même si elle nous aura couté la tête de course et fait perdre l’avance acquise. Les conditions attendues sur la suite du parcours ne semblent pas favorables à une échappée des leaders : en position du chasseur, Sodebo Ultim revient dans le match.
Thomas Coville : « La suite est très compliquée, on est au près dans de la mer hachée et formée. On a du mal à avoir la même cadence que les autres, on y travaille. Après, il y a de tels impacts sur le bateau qu’on se dit qu’on n’en est qu’à la moitié de la course et qu’il faut peut-être les laisser s’énerver. On va avoir beaucoup de manœuvres ces prochaines heures, ça va re-forcir la nuit prochaine avant qu’on arrive à l’approche de l’anticyclone où on devrait de nouveau se regrouper avec des vents faibles »